samedi 25 novembre 2023

Ecrire un roman : anatomie d'une obsession

J’en ai déjà parlé dans un billet précédent, mais ces derniers temps, j’éprouve une drôle de sensation, que je connais pour l’avoir déjà vécue cinq fois, que j’adore mais que je redoute également ! Je veux parler de cet état d’excitation intense, de fébrilité qui m’étreint lorsque je suis sur le point de me lancer dans l’écriture d’un nouveau livre, ou alors de poser le point final à un manuscrit en cours. Et c’est cette deuxième raison qui m’obsède en ce moment.

C’est tellement fort que j’ai l’impression que toutes les molécules de mon corps vibrent à l’unisson, tandis que mon cerveau baigne dans une espèce de lave glaciale et gluante. Cette sensation de repli sur soi est si dingue qu’on dirait que mon esprit s’avale lui-même, un peu comme si l’univers tout entier implosait, s’auto-aspirant vers un point gravitationnel central irrésistible. C’est totalement grisant, mais malheureusement, le revers de la médaille est à l’avenant.

Je ne pense qu’à ce livre, sans arrêt, au détriment de tout le reste. Impossible de me concentrer plus de quelques minutes sur autre chose. Je fais tout machinalement, sans y penser, par pur automatisme. Dans ces moments-là, même mon travail peut passer en tâche de fond. Toute mon essence turbine à 100% pour Le moment ou jamais ; et tous les autres aspects de ma vie quotidienne, dont certains vitaux, passent au second plan.

Mon corps m’échappe. Pour vous donner un exemple concret : je dois parcourir 74 km en voiture pour aller au bureau. Dès que j’ai rejoint la route, je me mets en mode « pilotage automatique » sans même m’en rendre compte et je « ne vois plus rien » jusqu’à ce que j’arrive à destination. Je conduis, bien sûr, mais sans vraiment voir la route. Parfois un danger intempestif me tire de ma transe, mais c’est pour mieux y replonger, encore plus profondément, quelques instants plus tard.

Je ne vous cache pas que ce n’est pas facile à vivre, mais c’est surtout pour l’entourage que c’est le plus compliqué. J’écoute sans écouter, je réponds aux sollicitations mais souvent par onomatopées, ou à côté de la plaque… Mon ex-épouse, que cela horripilait, me disait « tu es là mais en fait, tu n’es pas là ». C’est une bonne description du phénomène. C’est probablement une des raisons qui a fait qu’aujourd’hui, je parle d’elle comme de « mon ex ».

Dans ces moments difficiles, je vous jure que je lutte contre moi-même. Je m’épuise à tenter de garder un pied dans le monde réel, parce que je n’ai pas envie que ça recommence. J’aime ma compagne et je ne veux en aucun cas lui faire de la peine. Mais c’est plus fort que moi. Mes pensées m’assaillent et m’enveloppent comme un linceul sinistre, et cela me demande une énergie folle de les contenir.

Alors pour temporiser, je m’accroche au jalon de mes prochaines vacances, qui s’approchent lentement, mais sûrement. Noël et le premier de l’an ne seront qu’un détail sans importance, cette année car j’ai l’intention de consacrer le plus clair de mon temps à terminer ce projet que j’ai entrepris il y a deux ans. Entretemps, j’essaye de garder tant bien que mal la tête hors de l’eau mais combien de temps encore, avant que je ne me noie ?

lundi 20 novembre 2023

La recherche, étape essentielle à ne pas négliger

Un roman, et notamment un "thriller", ça ne s'écrit pas à la légère. Il vaut mieux savoir de quoi on parle, surtout lorsque le sujet développé est un peu technique, histoire de rendre le récit un minimum crédible et de ne pas passer pour un idiot auprès d'un lectorat un peu plus avisé que la moyenne. C'est pour cette raison que je passe énormément de temps à rechercher et corroborer des sources, à interviewer des spécialistes et à prendre des notes sur tous les sujets pour lesquels je sens que mes connaissances sont approximatives...
Bref, c'est un vrai travail journalistique, mais qui est véritablement essentiel. 

J'ai eu à faire cette recherche pour chacun de mes romans. Pour la trilogie L'infection (au sujet de l'intelligence artificielle, mais également des trous noirs et de l'espace-temps, de l'armement militaire, des missions et actions de la Gendarmerie, des différentes forces de police aux USA, de ce qui se passerait en termes d'environnement en cas de guerre nucléaire... Je suis même allé jusqu'à visiter de lieux emblématiques du roman dans le monde réel ainsi que via Google Streetview...) mais aussi pour Les routes du crépuscule (renseignements pris sur les hôpitaux psychiatriques en France, effets de l'usage de stupéfiants, repérages de lieux que je n'ai jamais vus comme le Vietnam ou le quartier Camden Town à Londres, etc.). La question ne s'est pas posée avec Mauvais berger ! car il s'agit d'un récit autobiographique, et donc tout ce que j'y raconte est vrai. De mon point de vue, s'entend.

Le moment ou jamais ne déroge pas à la règle. Par exemple, l'un de mes personnages se retrouve tétraplégique avec un syndrome d'enfermement, après un accident de voiture. Je suis d'abord allé chercher une spécialiste (ma cousine, infirmière de métier, m'a donné les bons termes médicaux). Mais il me fallait plus de détails pour la suite que j'imaginais, car la scène que je décris (et que vous découvrirez à la sortie du livre) se doit d'être réalisable et surtout réaliste, notamment pour éviter de distraire le lecteur, dont je souhaite qu'il soit uniquement assailli par un sentiment d'horreur. J'ai donc été chercher de la documentation en ligne sur la façon de nourrir ou désaltérer une personne dans cette situation (cf vidéo ci-dessous). 

Verdict : cela va supposer des petits aménagements pour que ma vision de la scène colle avec le réalisme imposé par la situation, mais comme le dit le proverbe : à cœur vaillant, rien d'impossible ! 

Soyons clairs : inutile de tout vérifier pour rendre une histoire crédible, surtout lorsqu'il s'agit d'une fiction avec des incursions fantastiques car c'est un genre littéraire qui autorise un minimum de fantaisie. Par exemple : j'ai situé la première partie du roman au château de Libarrenx. Mais ce n'est pas exactement pour l'usage qui en est fait dans la réalité : j'ai transformé la bâtisse en Ehpad. Je me suis donc permis certaines libertés concernant l'agencement des pièces, couloirs et autres commodités. Ce qui ne m'empêchera pas d'aller voir sur place à l'occasion, maintenant que le texte est écrit, davantage par curiosité personnelle que par souci du strict respect de la réalité.

Mais on ne peut pas faire n'importe quoi non plus ! C'est un mélange subtil entre fantastique et réalisme et l'un ne doit pas nuire à l'autre. En ce qui me concerne, tout doit paraître plausible. Je pense que je suis dans la bonne direction avec Le moment ou jamais. Vous m'en direz des nouvelles, le moment venu ! ^^ 

Mes livres : 

lundi 6 novembre 2023

#LMOJ : PETIT ÉTAT DES LIEUX

Juste un petit mot pour vous dire où j’en suis de mon nouveau roman Soyons clairs : je suis en période de mûrissement. C’est-à-dire que pour l’instant, je n’écris plus rien, mais je laisse les idées infuser en tâche de fond. Tout le plan est rédigé, bien qu’il m’arrive encore de noter quelques petites anecdotes qui nourriront le texte. Globalement, je sais tout ce qui va se dérouler dans les cinq prochains (et derniers) chapitres de « Le moment où jamais ». Les idées sont bien posées, il n’y a plus qu’à s’y mettre sérieusement. Mais…

La vérité, c’est que ces jours-ci, je n’ai pas de temps à consacrer à l’écriture. Quand je lis que certains auteurs écrivent systématiquement quatre à six heures par jour tous les jours (cf. Stephen King ou Bernard Werber), je ne sais vraiment pas comment ils font ! Moi j’ai besoin de m’y plonger plusieurs jours d’affilée pour que ça avance. Pas quatre heures par-ci ou par-là, en pointillés. Or, actuellement, je n’ai pas plusieurs jours d’affilée à consacrer exclusivement à mon livre.

Le truc, c’est que je ne suis pas romancier à 100%. J’ai un travail prenant (mais qui me convient à la perfection), huit heures par jours ouvrés (sans compter la route pour aller au bureau) et qui ne me laisse que les week-ends pour décompresser. Et comme vous le savez, l’automne est une saison chargée pour Astobelarra. Nous avons couru les salons en septembre et octobre, et nous avons lancé une souscription en simultané (le nouveau roman de Constance Dufort).

Sans oublier la mise en page d’un texte que nous allons publier sous la marque Vasconimedia (l’édition à compte d’auteur d’Astobelarra). Bref, je n’ai pas chômé, au cours des derniers week-ends. Pour vous dire : je n’ai même pas eu le temps de m’occuper de mon jardin, qui ressemble à un terrain vague mangé par les ronces. Alors écrire, pensez-vous !!! J’en viens presque à regretter le confinem… Non, je déconne.

J’ai posé deux semaines à Noël. J’espère bien pouvoir consacrer quelques jours à l’écriture de ces cinq derniers chapitres à ce moment-là. Une fois que ce sera fait, je ferai circuler le manuscrit dans notre comité de lecture pour avis et corrections, en espérant qu’il plaise assez pour envisager une publication à la rentrée de septembre. Si je rate cette occasion, il faudra attendre les prochains congés, ce qui rallongera d’autant le délai de sortie du livre.

C’est pas si facile, la vie de romancier, que j’vous dis !

mardi 12 septembre 2023

Si t’es pas prêt à ça, t’es pas prêt pour ce métier !

Ce matin, je me suis réveillé à 6h00 pour aller au travail. Je mets en général une dizaine de minutes à émerger, temps que je mets à profit pour regarder les nouvelles tombées dans la nuit. J’ai ouvert Google Actualités sur mon smartphone et mon œil a immédiatement été attiré par un article parlant du bassiste de Metallica, qui titrait : « Robert Trujillo a rejoint ses anciens compagnons de groupe de Suicidal Tendencies… »

Quelques jours auparavant, j’avais rêvé que Jason Newsted retrouvait sa place, 22 ans après avoir été débarqué (je sais : j'ai des rêves bizarres...). Ce qui est amusant car sans détester, je n’ai jamais été un immense fan de Metallica. Thomas Ponté s’amuse à dire que « Metallica, c’est Johnny », et finalement, je trouve qu’il a assez raison. Et c’est donc empli d’une curiosité malsaine que j’ai ouvert le lien et commencé à lire…

Mais avant d’avoir compris une seule ligne de l’article, j’avais déjà vu ça (image ci-dessus). Mais « What the fuck ! » est la première expression qui me soit venue à l’esprit, suivie de « Bordel de cul ! » Jugez un peu : je vois trois fois sur la même page la couverture de mon dernier roman proposé à la vente quasiment à moitié prix par Momox. Et juste à côté de celle du dernier Beigbeder, qui plus est ! Qu’avais-je fait pour mériter ça ?

Et puis je me suis rappelé que « les routes du Crépuscule » fait partie de mes alertes Google. Chaque fois que l’expression (ou un bout de l’expression) est utilisée en ligne, Google m’avertit chaque matin à 8h00. Pareil pour « Mauvais berger », « Astobelarra », ou « Mauléon-Licharre ». Sans oublier que Dimanche, lors du salon du livre de Lons, nous avions évoqué « Confessions d’un hétérosexuel légèrement dépassé » et que j’avais cherché la couverture dans Google Images. Bref… Tout ça parait logique.

La petite voix de Roger (cf Le moment ou jamais) a alors tinté dans mon oreille droite : « C’est le jeu ma pauv’ Lucette ! Fallait pas chercher ça sur Google ! » Certes, lui ai-je répondu, mais mon livre est bien en vente sur Momox, lui ! Et à moitié prix, surtout ! Du coup, je suis allé chercher sur Google ce que c’était que ce site avec un nom aussi bizarre, et voici un extrait de sa fiche Wikipedia : « Momox AG est une société de recommerce allemande fondée à Berlin, et spécialisée dans l’achat/vente de livres et articles culturels d’occasion. » Comme Rakuten (ex-Price Minister), quoi…

Voilà donc pourquoi !

Cela dit, ça m’a fait très bizarre sur le coup. Genre ascenseur émotionnel. J’étais partagé entre une sensation de joie : « Putain, mais mon livre est proposé à la vente dans des pubs en ligne !!! Incroyable, je suis aussi célèbre que Beigbeder ! Je vais enfin pouvoir me faire poser des implants capillaires pour ressembler à Jésus, moi aussi, et avant Thomas Ponté en plus ! » et une immense déception : « Ah mais c’est que des pubs ciblées… Quelle merde ! Chuis qu’une merde ! »

Et puis j’ai repensé à une récente story de Dreamkid, dont je suis le compte Instagram. Il publiait un commentaire immonde qu’il avait reçu rapport à son look extravagant, avec cette mention : « si t’es pas prêt à ça, t’es pas prêt pour ce métier ! » Alors j’ai relativisé, j’ai puisé au plus profond de moi la force de me lever, suis allé pisser et le reste de ma vie a continué… Comme d’habitude. Au temps pour les dreadlocks ! 

Thomas, tout est encore possible pour toi ^^

lundi 15 mai 2023

JUSTE UNE FUGUE D'ADO

En préambule : 

Bonjour à toutes et à tous ! Je m'apprête à supprimer définitivement mon blog "Xiberoland" (ou "correspondant-de-presse-64", ou "CLP64"), sur lequel je n'écris plus rien de consistant depuis des années. Ce n'est pas que la source de ma toute nuisance se soit tarie, mais plutôt que j'ai mûri. J'ai enfin appris, après 52 ans d'existence, que vouloir changer la société humaine, même à ma minuscule échelle, était vain. Les Hommes sont les créatures qu'ils sont. S'ils veulent détruire leur maison et leurs congénères pour gagner une poignée d'euros de plus, pour un poste avec un tout petit pouvoir de plus, qui suis-je pour les en empêcher ? Faites ce que vous voulez, je m'en lave les mains. 
Désormais, je n'ai plus envie de batailler pour autre chose que pour moi-même (et "mon œuvre"), c'est pour ça que ce blog-ci continuera d'exister aussi longtemps que j'écrirai. Cependant, j'ai pondu quelques textes que j'estime valables (littérairement parlant ou potentiellement amusants) dans "Xiberoland" et je ne veux pas qu'ils disparaissent à jamais d'un simple clic. Je vais donc les republier ici dans leur quasi intégralité, pour ceux à qui ça peut faire plaisir (dont moi). 
Pour les retrouver tous, il suffira de rechercher le tag "Azazel" dans les mots-clés de ce blog. "Azazel" en hommage à ce livre. Bonne lecture !

JUSTE UNE FUGUE D'ADO - 5 mars 2019

L'histoire que je m'apprête à vous conter date du début des années 80, c'était le bon temps des Goonies : je devais avoir entre 11 et 12 ans. A l'époque, j'étais au collège Elysée Mousnier, à Cognac. Je n'y étais pas heureux. A vrai dire, je n'ai jamais été heureux dans le milieu scolaire, que ce soit à la maternelle, à l'école primaire, au collège ou au lycée, ni même à la fac. J'ai toujours considéré le système scolaire tel qu'il a été pensé comme un moule rigide et froid fait pour formater l'esprit fantasque et spontané des enfants, afin d'en faire de bons citoyens dociles et endormis. L'école nous prépare depuis toujours à devenir de parfaits petit suppôts du macronisme !
Certains s'adaptent à la perfection à ces contraintes, beaucoup jouent le jeu pour survivre mais n'en pensent pas moins. Et puis il y a les autres, ceux qu'on appelle les "médiocres", les "paresseux", des qualificatifs moyennement sympathiques qui revenaient souvent dans les appréciations de mes bulletins de notes. 
Ces notes (mauvaises) qui ne servaient qu'à instaurer complètement ce système de compétition et qui m'écrasaient littéralement, m'ôtant toute envie de faire des efforts (le courage ne m'a jamais étouffé, faut dire)... Sans oublier les profs sectaires, ou élitistes, et/ou détestables (pas tous, heureusement)... Les cours de sports où, depuis le banc de touche sur lequel j'étais régulièrement consigné (la faute à mon incompétence et à mon rejet absolu des jeux collectifs), je devais regarder des heures durant deux équipes de couillons en short se disputer une pauvre baballe... Et puis la cour de récré, où il fallait se faufiler le plus discrètement possible afin d'éviter de tomber sur les "bandits" qui vous agressaient pour un jean acheté chez Leclerc au lieu de chez Carnaby (ou l'inverse) ou pour un bouton jaunâtre dans l'aile du nez qui ne leur revenait pas... Bref, Vous l'aurez compris, j'ai vécu l'école comme un long cauchemar (ce qui est relativement triste, pour un fils de profs...). 
L'école, c'est mon Vietnam à moi. Ça m'a tellement traumatisé que j'en rêve encore parfois la nuit, lorsque je suis habité par un grand stress. A ces occasions, je me retrouve à déambuler cul-nu (ou en pantoufles, si ce n'est les deux en même temps) parmi les autres élèves - tous habillés, eux -, dans la cour de récréation. J'essaye de planquer mon intimité comme je peux en tirant sur mon tee-shirt devant et derrière, même si ça n'a aucun sens puisque personne ne semble remarquer quoi que ce soit de ma situation délicate ! En général, je me réveille de ces rêves idiots avec un sentiment profond de honte et d'incompréhension. Je vous rassure : ça passe sous la douche... ^^
Et comme s'il fallait rajouter du stress au stress, le soir en rentrant, j'étais noyé de devoirs insipides et fatigants quand il ne fallait pas, en plus, que je ruse pour cacher mes mauvaises notes à mes parents. Pour ce faire, j'ai dû user (sans succès) d'à peu près tous les stratagèmes imaginables. A chaque fois, j'ai fini par me faire gauler ! Avoir des parents profs, ça peut être un avantage (ils ont la capacité - et le désir - de vous aider à progresser) mais aussi un inconvénient : ils connaissent tous vos trucs tordus et sont surtout très exigeants. Pour eux, votre échec scolaire n'est pas une option envisageable : vous DEVEZ réussir, point. Question d'honneur ou question d'époque ? Je ne saurai dire. 
Attention, je ne suis pas en train de leur reprocher quoi que ce soit, hein ? Je pense que mes parents ont fait ce qu'ils ont pu (avec les moyens du bord) pour mes frères comme pour moi. Ils l'ont fait avec amour et nous n'avons été privés de rien. Certes, ils étaient exigeants. Ça, je ne peux pas le leur enlever. Mais en même temps, comme dirait Macron (encore lui !?), sans leur investissement quotidien pour essayer de me sortir de ma médiocrité, sans leur insistance pour que je réussisse un minimum à l'école, qui sait ce que je ferais aujourd'hui ?  Sûrement pas écrire cette bafouille, j'en suis persuadé !
Longue introduction pour poser le décor... Mais revenons au début de ce billet !


💿 PARTIR UN JOUR, SANS RETOUR... GNAGNAGNA... SANS SE RETOURNER, NE PAS REGRETTER...


Tout cela constituait beaucoup trop de pression pour mes frêles épaules de pauvre petit adolescent, qui commençait à être affolé par ses hormones, qui plus est. Quand je vous parlais de cauchemar tout à l'heure, je n'exagérais pas. Je le vivais vraiment comme tel et ne voyais pas d'autre échappatoire que la fugue. Fuir, plus pour faire prendre conscience de mon mal-être à mes parents que pour réellement disparaître de la surface du monde. Je ne nierai pas : comme tout ado en crise, il m'est arrivé de penser au suicide. Mais  le côté définitif de l'entreprise a quelque peu bloqué ma réflexion à chaque fois que j'ai été tenté. C'est pour cela que l'idée de la fugue a peu à peu germé dans mon esprit perturbé, et s'est fait de plus en plus précise. Un mercredi après-midi de grosse colère (ma mère, qui venait de découvrir ma dernière "caisse" en français, malhabilement supprimée de mon carnet à l'effaceur, m'avait puni en me consignant dans ma chambre) j'ai décider de sauter le pas : j'allais partir pour de bon !

Alors, tout en pleurnichant de rage, je me suis préparé au grand départ : j'ai trouvé un petit sac en toile simili cuir dans lequel j'ai placé mon canif multifonction fétiche, une carte routière obsolète, une boussole pas super fonctionnelle et un vieux K-way. J'ai attendu que ma mère parte faire des courses, j'ai attrapé mon balluchon, un bâton et je suis parti en ânonnant quelque gros mot à l'attention du monde des adultes, de l'école, de la vie elle-même. "Tu vas moins faire la maligne quand tu vas rentrer et que je ne serai plus là, c'est moi qui te le dis ! Je m'en vais pour toujours, voilà ! Adieu et je ne reviendrai jamais !", me rabâchais-je, soudain épris de cette liberté nouvelle et prometteuse. Je me revois en train de marcher d'un pas décidé en direction de Châteaubernard, les poings serrés, tout en me congratulant de mon courage et de ma volonté soudains. J'étais Etienne sans famille ! Huckleberry Boyer ! Alexander Supertramp (bien avant Chris McCandless - avez-vous noté la référence ultime et cette savoureuse rupture du continuum spatio-temporel ?) !
Au bout du lotissement, j'étais déjà en train de réfléchir à l'endroit où j'allais dormir, une fois la nuit venue. Pas grave : un pont quelconque serait mon abri de fortune. "C'est pas ça qui va arrêter un Boyer, c'est moi qui vous le dis !"
Et pour manger, eh bien je... Gulp !
J'ai regardé ma montre : 16h30. C'était l'heure du goûter, comme pour me narguer... J'ai stoppé mon périple au beau milieu du pont, et j'ai réfléchi une poignée de secondes...
Derrière moi : la maison, ma chambre, le confort de mon lit, le goûter succulent qui m'attendait (et tous les suivants)... Mais aussi l'école, les notes, les parents qui ne me lâcheraient pas. Et devant moi : les vignes charentaises à perte de vue, l'aventure, la vraie vie, l'inconnu... Mais aussi le froid, la bouillasse, la solitude, la crasse et surtout la faim... Et peut-être les flics ou la morgue en conclusion. Cruel dilemme...
Je vous avoue que je n'ai pas mis longtemps à me décider. J'ai soupiré de dépit et j'ai rebroussé chemin en traînant des pieds. Pour la peine, une fois bien calé à la table de la cuisine, je me suis servi une double ration de pain et de chocolat abondamment arrosés de jus d'orange. Eh quoi ? Il fallait bien que je me console de ma déception (de moi-même) et de ma lâcheté, non ?!
Enfin rassasié, je suis remonté dans ma chambre pour méditer sur le sens de la vie au lieu de faire mes devoirs, mais pendant très longtemps, j'ai gardé le balluchon tout prêt sous mon lit, au cas où cette fois-ci, je partirais vraiment pour de bon et pour toujours.
Le soir-même, j'ai commis l'erreur de raconter cette histoire à mon frangin (celui du milieu) qui s'est ensuite bien foutu de ma gueule pendant des années à cause de ce "petit sac" de fugueur raté...
Par contre, mes parents n'en ont jamais rien su. Enfin je crois... J'espère qu'ils ne se sentiront pas culpabilisés à la lecture de cette anecdote. Le but de cet exercice n'était évidemment pas de jouer les "enfances malheureuses" mais juste de raconter ce petit souvenir de ma crise d'adolescence avec cette tendresse et cette auto-dérision qui me caractérisent...
Papa, Maman, je vous aime et merci pour tout. 

dimanche 26 mars 2023

JE SUIS DE LA GEN X - BIOGRAPHIE AUTORISÉE #1

Une fois n'est pas coutume, je vais écrire une série de billets pour vous parler de ma vie. Pourquoi ? 

1/ Dès que je racontais une anecdote un peu crue, un de mes anciens collègues de boulot me répétait avec un ton moqueur : "Etienne, tu n'as pas de jardin secret !" Une affirmation qui n'est pas tout à fait vraie. Pour ceux qui me connaissent, j'ai volontairement passé sous silence certaines de ces anecdotes et mis l'accent sur d'autres. Mais attention, je dévoile quand même pas mal de choses personnelles.  

2/ À la réflexion, après relecture de ce premier jet, ça a l'air d'avoir ni queue ni tête et de partir dans tous les sens. Mais en fait ce sont de petites briques informes qui, une fois assemblées, esquissent un grand tout plus ou moins harmonieux, un peu comme un journal intime (mais public), et qui explique beaucoup de choses.

3/ Ça a aussi l'air super péteux de croire que ma petite vie va intéresser quelqu'un, mais bon... Si je ne le fais pas, qui le fera, hein? Qui ? Quelqu'un qui ne me connaît pas et qui racontera des conneries ? Non ! Autant que ça vienne de moi. ^^

Vous êtes prêts ? Alors c'est parti !

VERY NORMAL THINGS

Je suis né en 1971. J'ai donc grandi dans les années 80. L'âge d'or, selon ma propre fille, née en 2002... Et je pense qu'elle avait raison. Grandir dans les années 80, c'était vraiment quelque chose ! Peut-être pas pour une jeune fille, mais bon... Laissons-la rêver !

À cette époque, il n'y avait pas d'ordinateurs portables, pas d'Internet, pas de réseaux sociaux, pas de smartphones, pas d'appareil photo numérique, pas de playstation, pas de Netflix et les voitures conduites par une IA, c'était encore de la science-fiction pour les trente années suivantes. Rien que ça, déjà, ça devrait lui remettre les idées en place, à ma fille !

C'étaient de années d'insouciance pure, ou chaque journée ressemblait à la précédente, où rien ne paraissait plus menaçant que le jour de la rentrée scolaire, si ce n'était le jour de la récitation au tableau. En fait, nous n'avions rien d'autre que le carnet de notes pour nous coller du stress*. Et, cerise sur la gâteau : la musique était chouette. Bref, c'était exactement comme dans "Stranger Things", mais sans "Vecna" ni le "monde à l'envers" (et sans "Stranger things", du coup).

Il se passait pourtant des choses importantes ou graves autour de nous et dans le monde (la mort de Lennon, celle de Coluche et Balavoine, la guerre Iran/Irak, la guerre froide USA/URSS, les essais nucléaires... Mais aussi des trucs plus positifs comme la fin de la peine de mort en France, l'avènement des radios libres et de la New wave...) mais nous n'en étions pas vraiment conscients. Nous vivions au jour le jour dans une espèce de candeur/torpeur qui semblait éternelle. Jamais nous n'aurions pu imaginer les ravages du sida, l'écroulement du mur de Berlin... Alors le 11 septembre 2001, les attentats du 7 janvier 2015, puis du 13 novembre suivant et Trump président, puis le réchauffement climatique, puis le Covid et ses confinements successifs, le retour des Talibans en Afghanistan puis Poutine envahissant l'Ukraine en 2022 étaient carrément inconcevables...

*J'ai déjà raconté un peu partout dans ce blog ma détestation viscérale de l'école, depuis la maternelle jusqu'à la fac et comment mes parents ont réussi à me pousser me porter contre vents et marées jusqu'au bac, et comment ils ont lutté - en vain - pour que je poursuive ensuite. Si je fais un peu ce que j'aime et ce que je veux aujourd'hui, c'est grâce à leur ténacité. Éduquer un gamin réfractaire, c'est pas facile, alors trois, je ne vous dis pas ! La tentation de laisser tomber a dû les effleurer une quantité de fois, mais ils ont tenu. Je veux qu'il sachent qu'ils n'ont pas tout raté et que je leur voue une éternelle gratitude pour ces années de leur jeunesse sacrifiée. 

PASSION ZOMBIES

Ce n'était pas la préhistoire, mais ce qui se rapprochait le plus de la modernité actuelle, dans mon environnement, c'était un tourne-disque qui pouvait jouer des vinyles en 45, 33 et 78 tours et un lecteur de bandes magnétiques. On y passait les singles de mes parents (Les Troggs, les Beatles, Sonny & Cher, les BoneyM...) et les rares disques qu'on achetait nous, mon frère cadet et moi, lorsqu'on avait économisé assez pour le faire. Quant aux bandes magnétiques, mes parents avaient réenregistré des lectures de livres du Père Castor ("Marlaguette", "Roule galette", "Michka"...) qu'ils utilisaient ensuite en fond sonore dans un petit théâtre de marionnettes (fabriqué par leurs soins), pour notre plus grand plaisir. 
Pour le reste, mes parents n'avaient même pas la télévision (au début). Dans mon entourage, seuls mes grands parents paternels possédaient un poste TV en noir et blanc et j'avais le droit de regarder "l'île aux enfants" uniquement lorsque j'avais bâclé terminé mes devoirs. En général, les horaires coïncidaient.
La télé couleur a fait son apparition chez moi en 1978. Je venais d'entrer en CE1. En semaine, j'avais le droit de regarder Félix le chat, Oum le dauphin, Candy, Goldorak et c'est tout. Autant vous dire que j'avais beaucoup de temps libre pour jouer, faire du vélo dans le lotissement ou construire des cabanes (et détruire celles des autres) dans les bosquets maigrelets du champ d'à côté. Car on n'avait pas peur de sortir de la maison et de traîner dehors jusqu'à l'heure du dîner, même en hiver. Les tueurs en série et les curés pédophiles existaient, bien sûr - ils ont toujours existé - mais n'étaient pas du tout médiatisés.

La même année, j'ai vu le premier Star Wars (l'épisode 4 dans le SWU) au cinéma, avec mon père. Ce film m'a marqué à vie, tout comme beaucoup de gens de ma génération. Car il y a toute l'histoire de l'humanité dans Star Wars. C'est comme une Bible. C'est la raison pour laquelle c'est une de mes références ultimes (lire "Mauvais berger !").
Parfois, ma grand-mère venait nous garder le samedi soir, lorsque mes parents sortaient. Elle nous laissait regarder "Champs Elysées" avec elle. C'est là que, pour la première fois, j'ai vu le clip vidéo de "Thriller", de Mickael Jackson. Inutile de vous dire que j'ai eu la trouille de ma vie ! Je pense que mon obsession pour les zombies et du gore date de là. Elle fut confirmée par la découverte de "Temps X", le magazine télé des frères Bogdanov (quand ils étaient encore BG, avant les "mutations"). Je me souviens encore des extraits de films d'horreur sur lesquels j'étais tombé (cf la scène des sauterelles dans "l'abominable docteur Phibes" - j'en ai cauchemardé pendant des années). Ici, l'expression geek "what you have seen you can't unsee" prend tout son sens.

J'avais 11 ans lorsque "The number of the beast" d'Iron Maiden est sorti. C'est mon oncle, de 8 ans mon aîné, qui me l'a offert. J'ai été fan illico ! Imaginez ça : de la musique de morts-vivants (c'est ce que la pochette du disque m'inspirait) ! C'était mon premier 33 tour à moi et je l'ai écouté en boucle. Je l'ai racheté en CD 20 ans plus tard et je l'écoute encore, parfois, avec nostalgie...

LES TEMPS MODERNES

Mon premier contact avec un ordinateur fut au cours de mon année de 5ème. Mon prof de math s'était mis en tête de nous initier à l'informatique en nous faisant travailler avec d'insignifiants logiciels codés en Logo à installer à chaque session au moyen de floppy discs. Toutes ses formes géométriques aux traits entrelacés n'avaient rien de très excitant... À cette époque, si on m'avait dit que j'allais passer les 3/4 de ma vie à pianoter sur un clavier et à dessiner des trucs avec une souris, j'aurais bien rigolé !

Parallèlement, pour avoir la paix quand les enfants débarquaient chez lui, mon grand-père avait fait l'acquisition d'une console Atari à cassettes. Avec mes cousins, on y faisait des parties endiablées de PacMan et Arcanoïd.
Plus tard, j'ai eu mon premier jeu électronique à cristaux liquides ("les crêpes", puis "le cheval de Troie" l'année suivante) et mon premier walkman autour de 13-14 ans. Je n'ai jamais vraiment été un grand joueur, comme pourrait l'être mon fils. Je finissais vite par me lasser de ces trucs simplets et répétitifs. Mon petit frère a eu plus de chance avec la première Game Boy, nettement plus intéressante. Mais quand cette console est sortie, j'étais déjà passé à autre chose depuis un bail !

À peu près à cette période, un grand nombre de foyers français se virent équipés d'un Minitel. L'engin ne servait que d'annuaire électronique. Je n'ai jamais cédé à l'appel du 3615 Ulla. Et pourtant, on peut dire qu'à force de pubs suggestives, elle aura insisté pour que je craque, cette brave Ulla ! Mais je savais que mes parents auraient fini par le découvrir, grâce à la facture détaillée.

Je dévorais comics et "livres dont vous êtes le héros" tout en écoutant inlassablement mes albums de Tears For Fears, Prince et Georges Michael sur cassettes, tandis que mes copains courraient le guilledou (pour les plus mûrs), chevauchant leurs 103 SP équipés de guidons torsadés, et autres Ciao ou Piaggo, plus classiques. C'est sûr que je ne faisais pas le poids avec mon BMX Gitane ! Et ceux qui restaient, les plus intellos, dissimulaient leurs frustrations de n'appartenir à aucun groupe en jouant à Donjons & Dragons ensemble. C'est à cette époque que je me suis mis à dessiner, tout seul dans mon coin. Je gribouillais sans arrêt "des petits Mickey" ou des superhéros de mon cru, dès que j'avais une minute, un papier et un stylo. Plus tard, à force d'entraînement, j'ai réalisé ma première bande dessinée de 5 pages. Je ne sais pas où elle a terminé (sûrement à la poubelle) mais j'en étais très fier, à l'époque. Pourtant, ce n'était vraiment pas extraordinaire, tant en terme de graphisme qu'au niveau scénaristique... Heureusement, je me suis pas mal amélioré depuis. 

3615 CODE PUCEAU
 
Pour mes 15 ans, j'ai reçu mon premier poste radio-cassette Philips, mais j'empruntais régulièrement le modèle double cassettes de mes parents pour me faire des compilations sur lesquelles je jouais à l'animateur radio. Bien plus tard, j'ai retrouvé par hasard un de ces enregistrements et j'ai eu la honte de ma vie en reconnaissant à peine la voix de puceau que je me coltinais à l'époque...

Le soir, je faisais semblant de dormir et j'éteignais subrepticement ma lampe de chevet au moindre bruit suspect. Mais mon père n'était pas dupe. Et la chaleur qui émanait de l'ampoule me trahissait presque à chaque fois... Je lisais "Podium" (pour me tenir au courant des potins de stars) et "Mad movies" en cachette (j'étais fasciné par le cinéma fantastique et en particulier pour les films d'horreur, genre Freddy Krueger) ou alors j'allumais la radio que j'écoutais au casque. D'abord la station locale "Radio feuille de vigne" (véridique), puis "Fun Radio", qui diffusait les singles plus actuels que je connaissais grâce à mes cousins bordelais, à peine plus âgés que moi. Comme tous les gosses de mon âge, je suis devenu incollable sur la pop des années 80. J'en écoute encore aujourd'hui et je fais même des quizz avec ma fille ! 

Au collège, je n'étais pas vraiment un chouette type. Les hormones me titillaient et ne n'avais pour ainsi dire pas de conscience ni de morale. À cette époque, il n'y avait pas eu de #metoo et l'éducation des jeunes ados mâles laissait plutôt à désirer de ce côté-là. Je sais que j'ai harcelé plusieurs camarades de classe de sexe féminin. Je tairai leurs noms par respect pour elles, mais je me souviens parfaitement de chacune d'entre elles. Je ne sais pas si elles liront ces lignes mais si oui, je veux qu'elles sachent que j'y repense souvent aux moment les plus inopportuns, comme une malédiction antique, que j'ai terriblement honte et que je leur demande pardon d'avoir été si con. 

Parfois, j'allais déambuler dans les rayonnages de Prisunic. J'y piquais des bandes dessinées au format poche. C'est ainsi que j'ai découvert les classiques érotiques de Serpieri, Manara et Liberatore, que je planquais sous mon lit, et avec lesquels je me paluchais allègrement en pensant à quelques filles de ma classe*. Si elle savaient, les pauvres, les outrages que je leur faisais subir dans mes fantasmes les plus vils... Et les litres de foutre qu'elles m'ont fait déverser dans des mouchoirs en papier qui terminaient invariablement dans la fosse sceptique... Si à chaque fois j'avais fait un don à une banque de sperme, la terre serait aujourd'hui peuplée de petits Boyer. 
Un jour, j'ai même imaginé que tout ce sperme finissait par s'agréger dans les égouts pour former une créature horrible, protéiforme et gluante, désireuse de se venger d'avoir été abandonnée par ses créateurs. Je l'avais appelée "L'abominable SpermMan"... Vous voyez ? Vous n'aimeriez pas être dans ma tête !

*Je glousse en me demandant combien de mes ex-camarades de classe vont se sentir visées (et salies) en lisant ces quelques lignes, haha !!! Quoi ? Vous croyez que je suis le seul pervers que vous ayez jamais rencontré ? Heureusement qu'on ne peut pas lire dans la tête des gens (et notamment dans celles des garçons de 11 à 99 ans), vous seriez surprises (et dégoûtées) de toutes ces choses horribles qu'on peut y trouver... 

PREMIERS ÉMOIS

L'été, je hantais la piscine municipale où je retrouvais quelques copains, filles ou garçons, désœuvrés, tout comme moi. J'y dépensais mes dix francs d'argent de poche mensuel en bonbons acidulés conditionnés en petits sacs plastiques. On les partageait sur la pelouse, tout en zieutant le plus discrètement possible les seins absolument parfaits que Nadège (le canon du collège) exhibait fièrement, le regard détaché, à peine caché derrière ses verres fumés. C'était l'époque des amours impossibles (car souvent non réciproques), et je dois avouer que j'en ai connu mon lot. il est vrai que je n'étais pas du genre dégourdi. J'ai bien eu quelques flirts, comme tout le monde, mais ça n'a jamais duré. En plus, pendant toute une période qui m'a parue trèèèèèèès longue, entre 13 et 17 ans, j'étais complètement aveuglé par mes sentiments carrément obsessionnels envers une fille rencontrée dans un camp de jeunes protestants*. Je me rappelle parfaitement du jour où je l'ai vue arriver dans la salle commune. Ça a été un coup de foudre instantané, avec éclair, grondement cataclysmique, tremblement de terre, embrasement des intestins et tout le tralala, mais uniquement de mon côté.
Dommage ! 😁

*Ah oui, parce que je ne vous avais pas dit : mes parents sont de confession protestante (calviniste). C'est la religion de toute ma famille (côté paternel) depuis des centaines d'années. J'ai donc été baptisé au temple de Cognac, et tandis que mes copains de classe allaient au catéchisme, moi j'allais à "l'école biblique". J'ai fait ma communion à 15 ans, je me suis marié au temple de Segonzac à 25 ans et on peut dire que j'ai été croyant et pratiquant (en dilettante) jusqu'à mes 29 ans. À partir de là, un événement (que je tairai ici) a fait sauter le verrou de mon système de croyances. Depuis, je ne crois plus en rien, mais c'est une autre histoire... Ce paragraphe concernant mon éducation religieuse est simplement destiné à préciser le contexte.

À la même époque, je jouais tous les jours aux figurines GI-Joe avec mon petit frère, de onze ans mon cadet. J'avais un peu honte de faire encore mumuse à 16 ans, mais c'était pour la bonne cause. Et puis contrairement aux autres jeunes de mon âge, je sortais très peu : ma mère était plutôt sévère (elle avait sans doute ses raisons - le plus souvent liées à mes résultats scolaires médiocres), nous vivions assez loin du centre ville, je n'avais pas une grande quantité d'amis sur qui compter pour m'accompagner au cinoche et pour couronner le tout, j'ai mûri tardivement. 

En seconde au lycée, j'ai créé un club de bandes dessinées avec quelques autres dessinateurs en herbe et nous avons collaboré à plusieurs numéros de "la Glossolalie", le journal du lycée édité par des terminales. Par facilité et poussé par mes parents, j'ai choisi la filière littéraire (A2). Je me suis retrouvé seul garçon de ma classe en première (curieusement, ça n'a pas été aussi génial que je l'avais pensé au départ), et on était 4 sur 31 élèves en terminale ! L'un de ces garçons, avec lequel j'avais sympathisé, m'a fait découvrir Pink Floyd et Sweet Smoke. La claque !

Puis j'ai grandi d'un coup entre la première et la terminale. Je suis tombé très amoureux d'une nouvelle camarade de classe qui, comme de bien entendu, en aimait un autre, bien plus âgé (et qu'elle a d'ailleurs fini par épouser quelques temps plus tard). Je suis parti trois semaines aux USA (à Milwaukee) en voyage scolaire. Quand je suis revenu, quelque chose avait changé en moi. J'avais mûri, d'une certaine façon. J'étais loin d'être adulte, mais quelque chose d'inédit s'était passé dans mon cerveau.
J'ai eu mon bac je ne sais pas comment. Pas en travaillant, en tout cas : j'ai dû passer les 3/4 de mes révisions à faire la sieste, à dessiner ou à m'asticoter l'appendice, toujours en pensant aux filles de ma classe (on ne se refait pas).
Avec mon petit groupe de copines, on a fêté notre succès en sautant tout habillés dans la Charente (je suis resté sur la berge, à les regarder patauger), puis en partant en vélo à Lacanau.

PRESQUE AFFRANCHI

À la fin de l'été, je me suis offert (avec mon premier salaire de manutentionnaire chez Leclerc) un superbe poste avec lecteur CD pour partir à la fac d'anglais à Talence. Mon premier compact disc, c'était un album solo de Martin Gore, l'un des musiciens de Depeche Mode. Cette année-là, j'ai acheté une trentaine d'albums, dont "Painkiller" de Judas Priest, "Tubular Bells 2" de Mike Oldfield, "Bassanova" de Pixies et, bien sûr, le "Nevermind" de Nirvana. J'en ai acheté encore plus l'année suivante. L'une de mes colocataires avait une mini télé en noir et blanc. Je la lui empruntais souvent à partir du second semestre et regardais toutes les séries qui passaient sur la 5 au lieu d'aller en cours. La fac m'ennuyait. Je n'y voyais absolument aucune perspective d'avenir et il n'était pas question que je devienne prof, comme les darons. Et surtout, je n'ai jamais eu le courage de tenter une école de journalisme ou de bande dessinée. J'avais peur que mes parents ne me soutiennent pas.

Le soir, il n'était pas rare que j'aille me faire une petite toile à l'UGC à Bordeaux, ou que je m'envoie un petit cocktail au "Bœuf sur le toit" avec des copains, après avoir passé mon après-midi à fureter dans les rayonnages du Virgin Mégastore de Gambetta. On se terminait au "Cabaret bordelais", une boite en sous sol avec des voûtes apparentes située vers la place du Parlement. Je rentrais à mon appartement avec le dernier bus pour Talence, ou à pieds. C'était la belle vie, insouciante et désinvolte, presque libre. Quand j'y repense, j'ai un peu honte d'avoir autant profité de mes parents, pendant cette période.
Mais qui ne l'a jamais fait ?

J'avais 19 ans quand j'ai rencontré ma première "vraie" petite amie, une lectrice anglaise un peu plus âgée que moi avec laquelle je suis resté deux ans. La seconde année, elle a eu pour projet de partir travailler pendant l'été aux USA. J'aimais bien l'idée, et si je n'avais pas eu autant la flemme de remplir les papiers, je l'aurais suivie volontiers. Mais que voulez-vous, on ne lutte pas contre sa nature. La flemme, c'est une constante inamovible dans ma personnalité. Mais pour ma copine, c'était comme une preuve (de plus) de mon manque de maturité et d'investissement dans notre relation. Du moins est-ce ainsi que je l'ai interprété. De mon côté, je voyais de plus en plus la distance physique et ce voyage avorté comme un signe que ça ne pourrait pas fonctionner entre nous. Or je marche beaucoup avec les signes. Ça me donne une bonne raison de faire - ou de ne pas faire - les choses. Alors je l'ai quittée. Sur le coup, ça m'a rendu très malheureux mais c'était pour le mieux, au final : elle a rencontré celui qui deviendrait son futur mari et le père de ses deux filles pendant ce voyage aux USA ! Encore un signe...

Le fait d'avoir raté mes études et déçu mes parents, ajouté à cette séparation douloureuse, m'a poussé à tout lâcher. Après la seconde année, j'ai décidé d'effectuer mon service national (obligatoire) à l'armée. J'avais sans doute besoin d'un bon coup de pied aux fesses, et c'était en quelque sorte l'occasion qui faisait le larron.

À SUIVRE...

dimanche 12 mars 2023

LES TROIS LIVRES QUI ONT CHANGÉ MA VIE !


Dans notre société, actuellement phagocytée, intellectuellement parlant, par les réseaux sociaux, Netflix et la Playstation, on aurait tendance à sous-estimer le pouvoir des livres, voire à carrément oublier leur existence. Pourtant, en ce qui me concerne, l'arrivée de la lecture dans ma vie a été un immense bouleversement. Si je n'avais pas commencé à lire des livres, je n'aurais jamais écrit quoi que ce soit.

Je l'ai déjà dit un peu partout ici, je dois cette passion de la lecture essentiellement à ma mère (et à ma marraine) qui ont lourdement insisté pour que je m'y mette. Mais parmi tous les bouquins que j'ai pu lire depuis que je suis en âge de le faire, il en est trois qui ont été plus que déterminants.

J'aurais pu vous en citer des centaines. Des polars, des romans fantastiques, des romans d'aventure ou de terroir, des classiques ou des romans de gare, mais aussi des mangas, des bandes dessinées ou même des magazines... Mais à un moment donné, il faut bien faire un choix. Alors, quels sont les trois livres qui ont changé ma vie et pourquoi ? 

1/ "Le manoir de l'enfer", de Steve Jackson

Un livre d'horreur dont vous êtes le héros qui m'a donné le goût de lire à une époque où ce n'était pas d'actualité. C'est Florence, l'une des filles de ma marraine qui m'a initié aux livre de rôles lorsque j'avais 14 ans. Je me rappelle très bien qu'elle m'avait prêté "le Labyrinthe de la Mort" de Ian Livingstone tout en m'exhibant le fameux dé à 20 faces utilisé dans les parties de Donjons et Dragons. J'avais trouvé ça tellement génial que je m'y suis mis illico en rentrant à la maison. Certes, ce n'était pas de la très grande littérature, mais j'ai été immédiatement pris par le jeu, le suspense et l'univers développés.
Le concept de ces livres : le récit est divisé en paragraphes numérotés. En fonction des choix que vous faites (vous choisissez le café, allez au n°285 ou le cognac, rendez-vous au n°17 ?) et/ou du tirage que vous obtenez avec trois dés, vous poursuivez l'aventure ou vous mourrez et il faut tout recommencer à zéro. 
Inutile de préciser que j'en ai par la suite dévoré un paquet, de ces livres dont vous êtes le héros. Mais celui qui m'a le plus marqué, c'est bien "le manoir de l'enfer" qui, en plus des points de VIE et D'ENDURANCE, avait la particularité de cumuler des points de PEUR. C'était donc mon premier livre d'épouvante, avec ambiance glauque, zombies, démons, secte sataniste et psychopathes tortionnaires ! J'ai adoré. Ma mère sans doute moins, mais c'était quand même de la lecture et j'y passais des heures...

2/ "La dernière chance", de Robert Newton Peck

Un roman jeunesse d'aventure qui m'a donné le goût de la vie sauvage et encabanée, des grands espaces naturels, de la marche en montagne, de la forêt la nuit, de la solitude, de la contemplation et de l'introspection, etc. C'est de là, je pense, que vient mon "trip survivaliste". En tout état de cause, c'est pour cette raison que j'ai quitté ma Charente natale pour me rapprocher des Pyrénées (à l'origine, je visais l'Ariège, mais les basques m'ont très bien accueilli, alors je suis resté). Et c'est également pour ça que je me suis choisi une maison la plus éloignée possible de la civilisation (tout en ne restant pas trop loin quand même - faut pas déconner). Dès lors, il ne faut pas s'étonner si on retrouve tous ces aspects dans chacun de mes livres.
Je n'ai pas encore décidé si j'intégrerai un de ces éléments dans "Le moment ou jamais", mon prochain roman en cours d'écriture, mais je me dis que si je me pose la question, c'est que c'est plus qu'une probabilité ^^

3) "Replay" de Ken Grimwood.

C'est l'histoire de Jeff, qui meurt à 43 ans d'un arrêt cardiaque au boulot. On pourrait croire que l'histoire va se terminer ici, mais en fait non. Il se réveille dans sa chambre d'étudiant, 25 ans auparavant, en ayant gardé en mémoire sa vie précédente. Il va d'abord essayer de changer le continuum temporel en vain (il ne peut pas empêcher J-F. Kennedy de se faire décalotter le crâne en 1963), puis tenter d'améliorer sa propre vie, jusqu'à ce qu'il atteigne ses 43 ans. Et là rebelote. Il re-meurt, puis revit, puis re-meurt, puis revit encore et ainsi de suite. Sauf que les fois suivantes, il revient à la vie de plus en plus tard et de façon exponentielle. Je ne vais pas vous en dire beaucoup plus, pour ne pas trop divulgâcher, mais outre l'intérêt du prétexte fantastique, notre héros va vivre sa vie de façon différente à chaque fois et rencontrer un autre être comme lui, jusqu'à ce que le moment de sa renaissance se confonde avec celui de sa mort.
L'histoire fait se poser un tas de questions philosophiques sur ce qu'on est au fond de nous, ce qu'on voudrait changer de nos propres vies, ce qu'on revivrait avec plaisir, etc. Ce n'est pas pour rien si c'est également le thème de mon dernier roman "Les routes du crépuscule", primé au salon du livre de Navarrenx 2023.

Voilà pourquoi je chéris particulièrement ces trois livres plus que n'importe quel autre : on retrouve les trois thématiques qu'ils développent (l'épouvante, le gore, le trash - l'aventure et la contemplation de la nature sauvage - le fantastique soft) et un style plutôt "facile à lire" dans toute "mon œuvre" (lol). Même dans la tranche de vie "Mauvais berger !", qui raconte une histoire vraie !

mardi 7 février 2023

MON ROMAN "LES ROUTES DU CRÉPUSCULE" PRIMÉ AU 20e SALON DU LIVRE DE NAVARRENX !!!

Eh oui, vous avez bien lu : tout est dans le titre ! Mais si ça vous intéresse d'en savoir davantage, lisez la suite ^^

Ce week-end, je suis allé avec les potos de l'écurie Astobelarra (Constance Dufort, Caroline Herrera, Franck Manuel et notre présidente Marjorie Vandevenne) au salon du livre de Navarrenx. Ne faites pas les surpris, j'y vais tous les ans depuis 2008, hormis en 2021 pour cause de Covid ! J'avais déjà envoyé quelques uns de mes précédents livres à des concours littéraires, notamment "L'infection T3 Sepsis" et "Mauvais berger", sans jamais avoir de retour encourageant autre que "au fait, j'ai bien aimé ton roman". Ce qui n'est pas rien, avouons-le...

En 2022, j'ai inscrit "Les routes du crépuscule" au concours du salon du livre d'Orthez, à celui Lons et à celui de Navarrenx. Je m'étais juré que si je n'avais rien pour ce livre, que j'ai littéralement sorti de mes tripes (si un de mes romans mérite un prix, c'est bien celui-ci), je laisserais tomber les rêves de gloire une bonne fois pour toutes. J'aurais évidemment continué d'écrire après cet échec, mais sans plus me faire d'idées quant à une éventuelle reconnaissance de la qualité de mon travail.
Je n'ai rien eu aux deux premières dates. C'est l'amie Constance Dufort qui y a par contre été respectivement primée pour "L'abri" (Astobelarra) et "La part des anges" (Yucca) ! 

Il ne me restait plus que le salon du livre de Navarrenx pour faire mes preuves et coup de bol, #LRDC a finalement été primé le 4 février dernier ! Alors certes, je n'ai pas eu le premier prix (obtenu par le recueil de nouvelles de Bruno Le Cun), mais le second, ex aequo avec le roman jeunesse de Gianmarco Toto, parmi une dizaine de participants. Ce sont donc trois genres littéraires différents qui ont été récompensés. Au moment de la remise des prix, je me suis amusé à découvrir le titre du livre de mon co-primé : "les sentinelles du crépuscule". Je ne peux m'empêcher d'y voir un signe ironique du destin... ^^

La vidéo est de Dominique Aucher.

En tout cas, passé l'effet de surprise (et - je ne le cache pas - la déception fugace qui m'a étreint lorsque l'adjoint à la culture m'a annoncé que je n'étais que second), je suis au final très heureux d'avoir obtenu ce prix. C'est quand même une preuve de reconnaissance de mon travail et je suis plein de gratitude pour l'équipe de "Terre de livres", organisatrice de ce salon qui fêtait également ses 20 ans cette année, et dont le thème était "l'art de raconter". J'ai trouvé là aussi que c'était un drôle de hasard, presque prédestiné. "Les routes du crépuscule" se devait d'être primé cette fois-ci. 

C'était comme qui dirait "le moment ou jamais" ^^

Lire l'article complet sur le blog de Jean Sarsiat.

mercredi 18 janvier 2023

J'ai testé #chatGPT

Qui n'a pas encore entendu parler de #chatGPT ? Pour les ignares ou ceux qui n'ont ni radio ni télé, il s'agit d'une intelligence artificielle qui permet de rédiger des textes sur demande. C'est assez bluffant pour tout ce qui est texte institutionnel, lettres, etc. Pour ce qui est de la fiction pure, je pense que les auteurs de chair et d'os ont encore de beaux jours devant eux ^^

J'ai essayé de tester la machine avec le pitch qui m'a inspiré mon prochain livre, en cours d'écriture. Le résultat n'est pas mauvais, mais c'est plat : ça manque un peu d'imagination et de cynisme. Et il y a des répétitions. Je vous partage ce qu'à pondu #chatGPT : 

Pas super concluant, hein ? 

Et sinon, pour vous donner des nouvelles, j'ai écrit les six premiers chapitres de "Le moment ou jamais". Ça avance pas mal. Pas aussi vite que je le voudrais, mais bon. Rome ne s'est pas faite en un jour !