jeudi 18 mars 2021

La dernière chance, mais ce fut la première, pour moi.

Souvent, j'essaye de me rappeler du pourquoi du comment des choses. Par exemple, pourquoi j'ai toujours été attiré par la Nature, les grands espaces, la montagne, la vie sauvage, la randonnée, la survie, la solitude ? Pourquoi retrouve-t-on ces éléments dans chacun de mes livres ? Est-ce que c'est un inné ou un acquis ? 

Du plus loin que je me souvienne, le détonateur, encore une fois, c'est ma mère. Non qu'elle soit elle-même une grande aventurière, mais c'est elle qui m'a choisi les livres qui m'ont petit à petit amené à ces passions. Le premier de ces livres - bien avant Désert Solitaire (Edward Abbey), Into The wild (John Krakauer), Wild (Cheryl Strayed), Dans les forêts de Sibérie (Sylvain Tesson) ou même le récent Encabanée (Gabrielle Filtau-Chiba), que j'ai lus et relus bien plus tard, parce que ma mère a su me donner le goût de la lecture lorsque je peinais à l'école - c'était La dernière chance, de Robert Newton-Peck. Ce roman jeunesse publié chez Castor Poche Flammarion raconte l'histoire de Collin, un jeune ado indiscipliné que son père envoie dans les montagnes du Vermont, chez un certain Monsieur Kirk, un vieux trappeur solitaire qui lui apprendra les rudiments de la vie et accessoirement à devenir un homme. 

Je me souviens avoir adoré ce roman initiatique et l'avoir lu au moins deux fois. J'en garde un excellent souvenir, alors je me suis dit que j'allais me le racheter et le relire à l'âge adulte, pour voir si c'était si bon que ça. Et verdict : c'est un passionnant roman pour adolescents, malgré quelques faiblesses dans la narration (essentiellement des redondances : "Han, je marche tout seul dans la nuit, perdu dans la neige, avec un fusil très lourd, j'ai peur, je suis fatigué, mais quel exploit ! Je me demande ce que dirait mon ancien prof de sport s'il me voyait aujourd'hui" reformulé au moins 3 fois dans le même chapitre) ou dans le réalisme de l'histoire (le gamin qui fout rien à l'école mais qui se souvient parfaitement d'où se situe l'appendice et de comment y accéder, malgré la fatigue et la panique. Il pense à l’asepsie et à recoudre tout bien comme il faut, comme un vrai petit chirurgien). Je me souvenais vaguement des personnages principaux, du fil conducteur, de l'ambiance générale, mais pas de tout les petits à-côtés. Reste que j'ai quand même passé un bon moment à le relire, ces derniers jours et ça m'a fait comme une madeleine de Proust. Quelque part, je ne peux m'empêcher de penser qu'en m'offrant ce livre, ma mère a semé, sans le vouloir, la petite graine qui a fait que j'ai quitté ma Charente natale pour venir vivre dans les Pyrénées. La rencontre avec mon ex, 11 ans plus tard, et son amour inconditionnel pour l'Ariège n'ont fait que faire germer et pousser la plante.

Est-ce que c'était écrit ? Est-ce que j'avais mon libre arbitre dans tout ce cheminement ? Je n'en sais trop rien et quand j'y pense aujourd'hui, à l'aube de mes cinquante ans, je trouve tout ceci tellement vertigineux que je me force immédiatement à penser à autre chose.
Toujours est-il que mon prochain roman, dont le titre de travail est, je le rappelle, Les routes du crépuscule, se déroulera également en partie dans les Pyrénées, notamment en Ariège mais aussi en Soule. En écrivant ses histoires, un auteur se met à nu et livre tout ce qui est en lui. Je ne déroge pas à cette règle : les montagnes et les forêts souletines coulent dans mes veines et font battre mon coeur depuis 24 ans. Mais en vérité, j'ai presque l'impression que c'est depuis toujours.

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