Lorsque j’ai rencontré Christophe en
“chair et en os”, l’une des premières phrases qu’il m’ait dite -en guise
d’avertissement- est quelque chose comme “Pour être berger, il faut avoir les codes. Si tu ne les as pas, tu n’y arriveras jamais”.
Sur le moment, devant cette maxime sibylline qui ouvrait mille
possibilités d’interprétation (dont certaines que je me refusais même à
imaginer tellement elles m’étaient insupportables), j’ai essayé de lui
faire préciser ce qu’il voulait dire par “les codes”. Mais ce fut en vain : lui même semblait incapable de traduire ses paroles de façon explicite.
Avec le temps, de cette phrase
énigmatique qu’il répétait à l’envi (en particulier lorsqu’il voulait me
faire un reproche détourné), j’ai fini par (més)interpréter que ces “codes”
étaient quelque chose qu’on ressent dans ses tripes comme une évidence,
un instinct, une loi divine. Je me disais que ce devait être un genre
de code “moral”, ou de “bonne conduite” du bon berger, et je
m’appliquais donc à observer, à comprendre, puis à imiter ces gens dans
leurs rapports sociaux autant que dans leur rapport au travail, leurs
contacts avec les animaux, etc. Et ce même si cela contredisait parfois
mon éducation, ou mes propres convictions.
Étrangement, la dernière phrase que je l’aie entendu prononcer était l’affirmation que décidément, “je n’avais pas ces fameux codes, et que jamais je ne serais un bon berger”,
d’où le titre du livre! Il m’aura fallu attendre dix ans pour digérer
tout cela et comprendre que ces codes auxquels il faisait sans cesse
allusion, ne pouvaient être que… Les codes “génétiques”!
Les mêmes qui font que, quel que soit le
pays, la région, la vallée où l’on décide de se fixer, pour
l’autochtone, on restera éternellement “l’étranger”, et ce jusqu’à ce
qu’on ait au moins trois générations au cimetière (et c’est un minimum)!
J’ai bien peur que certaines “traditions” ne changent jamais, même avec
le temps qui passe et les “avancées” sociétales…
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