vendredi 21 décembre 2012

KEN ET LA PETITE PRINCESSE

Un petit conte de Noël, pour les amateurs :

Il était une fois, une petite princesse qui vivait dans un joli château.

La petite princesse possédait un paquet de poupées Barbies (une qui fait la vaisselle, une qui fait le ménage, une qui fait la cuisine, une qui torche les mômes, une qui séduit, une qui joue la comédie, une qui fait du cheval, une qui baise...), mais pas de Ken.


Un jour, il y a très longtemps, la petite princesse s'est fait offrir un Ken. Un beau Ken avec un sourire éclatant et un brushing parfait, on aurait dit un vrai lord anglais manufacturé en Chine.

Elle en était fière de son Ken, la petite princesse. Au début, elle l'emmenait partout avec elle. Elle exhibait fièrement son bel étalon à ses petites copines, dont certaines étaient sûrement un peu jalouses. Et puis, le temps a passé.

 

Le belle peinture jaune des cheveux de Ken s'est écaillée, sa peau de pêche s'est tâchée à force d'être tripotée par des mains malhabiles et pas toujours très propres. 

Bref, la petite princesse a commencé à s'en lasser de son Ken, et même à le délaisser. Un jour, elle l'a carrément oublié dans le jardin pendant une semaine.

A la merci des intempéries et de la tondeuse, son beau costume s'est abîmé. Sous le soleil, ses plastiques et caoutchoucs se sont déformés, ses articulations autrefois solides et toniques se sont ramollies. Ken ne tenait plus debout tout seul. Il n'avait plus la classe de ses débuts. Il lui faisait même un peu honte, à dire vrai.

D'autant plus que de tout nouveaux Ken tout neufs et encore plus beaux trônaient dans les étalages de Noël des supermarchés, attisant son envie irrésistible de changement.

 

Alors elle a commencé à le maltraiter, son Ken. Elle le jetait régulièrement au plafond, le laissant retomber lourdement sur le parquet, pour voir combien de temps il tiendrait. elle l'oubliait pendant des jours, des semaines, des mois dans le coffre à jouets. Et puis elle l'a brulé avec un briquet, lui a mâchouillé rageusement les doigts, lui a tapé dessus avec un marteau. Mais il était solide, malgré tout, ce vieux Ken. Il encaissait sans mot dire, conservant un semblant d'intégrité, malgré les cicatrices indélébiles.

 

Et ainsi, pendant des semaines, des mois, des années, il a résisté bravement, jusqu'au jour où la petite princesse à ouvert la fenêtre de sa chambre et l'a balancé de toute ses forces sur les graviers en contrebas. Sous le choc, le thorax de Ken s'est fracturé et son corps s'est désarticulé. Dans son visage - qui conservait son sourire d'un autre temps - de minuscules cailloux se sont incrustés.

 

Son jouet enfin cassé, la petit princesse a éprouvé de la satisfaction. Elle a pris les restes pulvérisés de la poupée et les a jetés aux ordures. Une semaine plus tard, un nouveau mannequin flambant neuf est arrivé au château. La petite princesse était heureuse.


Dans la poubelle, sous l'évier de la cuisine, accolé à une vieille carcasse de poulet mal curée, la face grêlée de Ken continuait de sourire béatement, attendant que l'éboueur fasse son office...

vendredi 7 décembre 2012

L'autre monde

Hier soir, j'ai enfin trouvé le temps de regarder "l'autre monde", un drame psychologique sorti sur grand écran en 2010 et qui se déroule à moitié sur notre planète (quelque part dans le sud de la France) et à moitié dans un univers virtuel appelé Black Hole. J'ai repoussé ce moment le plus longtemps possible, afin de ne pas polluer mon inspiration pour "L'infection". Et comme j'ai à nouveau un peu de temps devant moi, j'ai décidé de sauter le pas...

J'ai trouvé ce long métrage très intéressant et il y a bien entendu quelques similitudes avec mon roman, mais pas tant que ça, finalement. 

Voici le pitch : Gaspard trouve un téléphone portable qui appartient à une certaine "Sam". Entraîné par sa copine Marion, il décide de pister cette jeune femme et la sauve d'un suicide. Intrigué, puis subjugué par cette blonde platine qui vit sous la coupe d'un frère malsain, il va la suivre à l'insu de Marion dans le Black Hole. Mais dans les univers virtuels encore plus que dans la vraie vie, les apparences sont souvent trompeuses... Gaspard va mettre le pied dans un piège glauque, qui va se refermer sur lui et  balayer son innocence.

 
Vraiment, je vous conseille ce film, qui ne pêche que par le côté un peu juvénile des acteurs. On sent bien qu'il s'adresse surtout à un public adolescent et qu'il véhicule une morale un peu téléphonée, parfois, mais ça se laisse regarder avec plaisir.

mercredi 5 décembre 2012

UN COEUR DE NÉANT

Hier soir, je suis une fois de plus allé à l'atelier d'écriture de Mauléon-Licharre. Ce coup-ci, toujours dans le cadre du projet commun avec Astobelarra et les artistes de l'atelier Uztaro, c'est chez ces derniers que s'est déroulée la séance.

J'avais apporté deux textes de mon cru pour les peintres. Eux nous ont proposé un grand nombre de peintures très diverses, allant du figuratif à l'abstrait. La peinture ci-contre m'a tapé dans l'œil. Elle m'a fait penser à #BeauSmart, le vilain virus de "L'infection T1 : Contage" et m'a inspiré ce diptyque très manichéen sur la dualité de l'être :

Au premier abord, c'est un corps de glaise, blafard et glabre, sans forme, sans personnalité, froid, vide et effrayant. Sa surface translucide est dévorée par la lumière crue et n'exprime rien de plus que l'inachevé, la vie primaire et archaïque, fragile et malléable, inodore et sans saveur. Son existence semble laborieuse, cruelle et bien vaine.
Mais en réalité, ce n'est que la surface extérieure et très superficielle des choses. Rien qu'une enveloppe légère comme le crépon, qui cache un être incandescent, lumineux et en quatre dimensions. Il suffit seulement de se donner la peine de gratter le vernis fade, la fine surcouche d'albâtre qui recouvre son âme d'or massif et de se laisser éblouir par ses mille reflets éclatants.

*****

Au départ, c'est une silhouette ardente qui éclipse tout, un tempérament radioactif qui consume les étourdis un peu trop tactiles, car la passion ou la folie l'habitent. Son costume de lumière hypnotise les regards naïfs qui osent se poser sur ses formes mouvantes ou flatter ses aspérités incendiaires. C'est une créature vibrante, vivante et d'essence quasi-divine.
Mais ce n'est qu'une apparence, un genre qu'elle se donne afin de camoufler les tréfonds de sa véritable nature. Car en dedans, elle n'est qu'un désert mort, un esprit dépouillé de toute substance, inexpressif et sans relief. Un cœur de néant...

Je pense que ce texte est plutôt un genre de pêle-mêle, un jeter d'idées complètement instinctif et sauvage qui pourra probablement encore évoluer. Only time will tell...